Selon Patrick Mac Leod, neurophysiologue de pointure mondiale, on ne devient pas « accro » à son parfum par hasard : le goût et le dégoût qu’on a des odeurs n’ont rien d’inné. De sa naissance et jusqu’à la fin de sa première année, le bébé n’a aucun a priori contre tout ce qui se trouve sous son nez. Il peut tout aimer, de la fleur à l’odeur d’ail ou même pire. Tout va changer avec l’influence de la propre appréciation des parents, ensuite, de celle d’un cercle plus large qui va lui dire, et donc l’influencer « ça, c’est bon, ça sent mauvais ».
Nos intérêts plus personnels se formeront au cours d’aventures « odoriférantes » liées à des événements heureux. Supposons que le grand-père que vous adorez vous ait emmené en ballade, le jour de vos 10 ans (il faisait beau, il vous a offert un superbe cadeau, le déjeuner était succulent) et, en amoureux de la campagne, vous fait découvrir l’odeur de lilas. Il est très probable que toute votre vie vous gardiez le souvenir ému de ce dit lilas.
Ci-après, un article que j’ai trouvé intéressant sur le sujet de la mémoire olfactive, qui illustre que l’odeur ou le parfum est la forme la plus intense du souvenir. « Nous devrions être fidèles à un parfum pour que nos petits garçons soient fidèles à notre souvenir », écrivait voici il y a quelques années Marie Claire Pauwels.
Consultations parfum de Sylvaine Delacourte
C’est l’approche que j’ai dans mes consultations parfums. Dans un salon propice à la confidence, je fais voyager dans la mémoire pour retrouver et revivre les moments heureux, du temps le plus ancien au temps présent (fondé sur le fait que le patrimoine olfactif se détermine dans l’enfance, avant l’âge de 10 ans, et que l’être humain semble passer sa vie à chercher). Je collecte, durant deux heures environ, toutes les odeurs positives associées aux moments de bonheur, enregistrées dans « la très secrète boîte noire ». Je détermine donc le patrimoine olfactif. Ensuite, je valide avec notes ou accords olfactifs que je mets sous le nez, pour faire réagir et valider ainsi mes choix. Je suis prête pour commencer le travail du parfum sur mesure. Depuis 2 ans environ, nous avons réalisé une quinzaine de parfums : autant de masculins que de féminins.
Psychologie
L’odorat est le seul de nos cinq sens à accéder directement à la mémoire, autant dire à notre boîte noire.
Une fragrance, un fumet qui se dégage de la cuisine, le doux parfum de la pluie d’été, et nous voilà propulsées dans le passé. Un souvenir remonte à la surface : les couleurs, les lumières, le lieu précis où l’action s’est déroulée. « Un jour, en entrant dans une maison, j’ai fondu en larmes. Je venais de retrouver l’odeur de la maison de mon enfance », se souvient Christiane Samuel, coauteure du livre Êtes-vous au parfum ? (InterEditions).
C’est que l’odorat permet d’accéder aux émotions et aux sensations emmagasinées depuis la petite enfance, ajoute Patty Canac, experte en parfumerie, qui a aussi collaboré à ce livre. « Aucun autre sens ne peut stimuler la mémoire de manière si puissante. »
Si l’expérience peut paraître irrationnelle, il existe pourtant une explication très scientifique. Le nez capte les odeurs qui parviennent au bulbe olfactif, connectées au système limbique. Le système limbique, c’est un peu notre boîte noire, le siège des émotions et de la mémoire. Étrangement, l’odorat est le seul sens à être en prise directe avec cette précieuse boîte noire. Résultat : l’émotion précède l’information, c’est-à-dire que ce qui est perçu va susciter du plaisir, de l’inquiétude ou de la nostalgie avant même que le cerveau puisse l’identifier.
« Notre sensibilité à l’odeur commence dès le plus jeune âge. Dans la recherche du sein maternel, le nourrisson est attiré par une odeur sécrétée par le mamelon », confirme André Holley, professeur en neurosciences à Lyon et auteur d’Éloge de l’odorat (Odile Jacob). Jusqu’à l’âge de 12 ans, l’enfant enregistre un très grand nombre de senteurs agréables et de relents déplaisants. Durablement inscrits dans la mémoire, ils forment le patrimoine olfactif de l’individu. Ce sont ces souvenirs qui, tout au long de la vie, vont, entre autres facteurs, influencer son goût pour telle ou telle fragrance.
Si on apprécie une eau de toilette, c’est souvent parce qu’on y retrouve son passé. Pour ma part, si j’aime l’Heure Bleue c’est parce qu’il me rappelle la colle blanche de mon enfance, les gaufres à la vanille et les rouges à lèvres que je piquais à ma mère.
Les odeurs comme les parfums jouent un rôle important dans la vie sociale. Ils révèlent des informations sur l’autre : son hygiène (odeur corporelle), sa santé (odeur buccale) et sa personnalité (séductrice ou discrète, simple ou sophistiquée). « L’odeur, c’est le corps, et le parfum, l’habit ou le maquillage qui est là pour nous avantager ».
Selon moi, c’est même plus qu’un habit ou une parure, il doit correspondre au patrimoine olfactif et donc révéler la personnalité profonde. Il est en connexion avec notre identité !
« L’odeur se situe du côté de l’intime, alors que le parfum s’inscrit du côté social », souligne quant à lui Samuel Socquet-Juglard, auteur de différents ouvrages sur le parfum. Mais parfois les odeurs corporelles ont un lien avec la culture et les civilisations. Par exemple, les Japonais appellent les Occidentaux les « pue-le-beurre », vu la quantité de produits laitiers qu’ils consomment. Il semble que nous dégagions pour eux une odeur de lait caillé.
Le nez est un guide. « Il peut nous attirer vers quelqu’un ou, au contraire, nous en éloigner. Celui-là, je ne peux pas le sentir veut dire qu’on le sent trop », analyse Christiane Samuel. Aimer quelqu’un dont on ne supporte pas l’odeur est en fait extrêmement difficile, voire impossible. « On peut s’habituer à un physique disgracieux mais pas à une odeur qui indispose. On peut à la rigueur être amis, mais amants, non », ajoute Samuel Socquet-Juglard.
Pour le parfum, c’est moins catégorique – la personne aimée n’a qu’à le changer, après tout. « S’il donne la nausée, il est intéressant de comprendre pourquoi, poursuit-il. En remontant sa propre histoire olfactive, on peut découvrir par exemple que la rose rappelle une grand-mère acariâtre dont on avait peur quand on était enfant. »
L’inconscient, toujours l’inconscient. Cest bien lui qui réagit quand il est interpellé par un citron fraîchement pressé, les pages d’un vieux livre ou une balade en forêt. Des effets qui peuvent même être thérapeutiques.
Depuis deux ans, Christiane Samuel utilise les odeurs dans son travail d’orthophoniste pour la rééducation. Une démarche nouvelle en France et sans équivalent au Québec. Elle aide les amnésiques ou les patients sortis d’un coma à retrouver la mémoire en titillant leurs narines. Une odeur bien précise peut parfois enclencher le système de mémoire. « On peut même faire réagir des comateux en leur donnant à sentir leur propre eau de Cologne, explique-t-elle. Leur réaction est alors immédiate, telle celle d’un nourrisson qui souhaite communiquer. »
L’ammoniac contre les pulsions sexuelles ?
Le Centre d’étude et de recherche de l’Université de Montréal (CERUM) a recours à un procédé, le conditionnement olfactif, qui permet à des personnes aux prises avec des déviances sexuelles de mieux gérer leurs pulsions. Au cours de la thérapie qui dure plusieurs mois, l’individu – souvent un violeur récidiviste – doit casser une ampoule d’ammoniac dès qu’il a une érection. Les émanations coupent court à son excitation. Peu à peu, il arrive à se maîtriser.
Parfums Sylvaine Delacourte
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